LA MONTÉE EN PUISSANCE DE LA CHINE


Partager avec les autres

La Chine a fait l’histoire au cours des derniers mois.  En avril, le Lin Yi, une frégate lance-missiles, a passé un peu plus d’une heure dans le port yéménite d’Aden déchiré par la guerre avant de se diriger vers Djibouti avec 225 personnes évacuées de 10 pays. 

Le 10 août 2015

Les personnes évacuées ont été accueillies au port par les officiels djiboutiens, l’ambassadeur de Chine à Djibouti et d’autres diplomates.  Le Ministre des Affaires Étrangères du Djibouti, Mahamoud Ali Youssouf, a exprimé ses remerciements pour l’aide de la Chine pour l’évacuation des ressortissants étrangers, en disant que l’action était très touchante.

Présentée par Beijing comme la première évacuation maritime internationale de la marine, la mission permet de démontrer les ambitions croissantes de l’Armée Populaire de Libération.

Quelques jours plus tôt, la télévision de l’état a montré une photo satellite de trois sous-marins de la classe Shang ancrés dans une base top-secrète sur l’île de Hainan dans le sud de la Chine.  Le rapport les a identifiés comme les sous-marins nucléaires d’attaques les plus avancées de type 093G dont les experts disent pouvoir débuter ses premières patrouilles par des sous-marins à propulsion nucléaire de la Chine, au plus tard cette année.  La marine chinoise a maintenant plus de sous-marins d’attaque diesels et nucléaires que l’Amérique, selon un amiral de la Marine des États-Unis.  Certains d’entre eux sont « assez étonnants » et Beijing explore de nouvelles façons de projeter sa puissance sur les mers.

En outre, le Pakistan a accepté « en principe », d’acheter huit sous-marins chinois dans un accord qui pourrait valoir jusqu’à 5 milliards de dollars, le plus lucratif contrat d’armes de la Chine jusqu’à maintenant.

En mars, la Chine a également annoncé la construction d’un deuxième porte-avions.  On estime que les dépenses de la Chine pour la défense devraient augmenter de 10,1 pour cent cette année seulement.  Cela signifie que la Chine a augmenté ses dépenses pour la défense de plus de 10% chaque année depuis les 27 dernières années.  Plus inquiétant encore, les exportations d’armes de la Chine ont augmenté de 143 pour cent, ce qui en fait le troisième plus grand négociant en armes dans le monde, selon une nouvelle étude menée par l’Institut des Recherches Internationales pour la Paix de Stockholm.

Les questions que les analystes militaires se posent sont de savoir si la Chine est descendue sur la route de la militarisation ou si elle est tout simplement en train de reconstruire son armée ?  Il y a une distinction entre les deux termes.  La militarisation est ce que les pays font quand ils ont l’intention d’utiliser leur puissance militaire, et ceci ne se mesure pas seulement en termes de navires et de chars, mais aussi, dans leur comportement.  Les voisins de la Chine, tels que Taiwan, le Japon, le Vietnam et les Philippines, sont des plus capricieux à propos de Beijing renforçant sa mainmise sur des îles contestées.  L’Amiral Harry Harris, commandant de la flotte américaine du Pacifique, avait relié cela à la création d’une « Grande Muraille de Sable », se référant à une opération de dragage à grande échelle pour créer des terres sur des récifs isolés pour des ports, des casernes et même des pistes d’atterrissage.  Une source de réconfort pour ces pays est le fait que la Chine a récemment annoncé qu’elle arrêtait ses efforts de création de terres sur ces îles.

L’augmentation rapide des dépenses de Beijing et la défense de ses revendications maritimes, y compris une zone de l’océan qui sort de la mer de la Chine du Sud appelée la « ligne des neuf tirets » menacent de déclencher une course aux armements dans l’ensemble de l’Asie.  En raison de l’accumulation chinoise, le Japon a commencé à débattre des mérites de sa constitution pacifiste d’après-guerre.  (Le budget de la défense de la Chine est de 3,6 fois plus grand que le budget du Japon pour la défense.)

Accent international

Comme il a été signalé précédemment, Beijing a pris des engagements internationaux, à commencer par une mission navale en 2008 au large de la côte est de l’Afrique pour lutter contre la piraterie, marquant ainsi la première fois depuis 600 ans le déploiement de la Chine et de sa marine au-delà de ses rives.  La Chine a également envoyé une frégate dans un effort international pour escorter un convoi de navires transportant des armes chimiques de la Syrie hors de ce pays.  La Chine a également déployé certains de ses sous-marins dans l’océan Indien, avec un de ses sous-marins visitant le Sri Lanka par deux fois.

Avec ce nouveau pouvoir, la Chine a récemment démontré ses muscles militaires. Avant une visite en Inde, en septembre dernier par le président de la Chine Xi Jinping, les forces militaires chinoises se sont rapprochées de l’Inde le long d’une frontière contestée dans l’Himalaya.  Puis, en novembre 2013, le Ministère de la Défense de Beijing a annoncé une « zone d’identification de défense aérienne », qui exige que tous les avions voyageant à travers cette zone s’identifient et qui couvre des îles de la mer orientale de Chine revendiquées par le Japon.

Très peu de gens contesteront que le rôle de la Chine dans le monde est en hausse, mais, combien de défenses un pays a-t-il besoin ?  La manière dont les pays dépensent de l’argent en dit long sur leurs intentions.  Si la stratégie de Beijing est jugée seulement sur les chiffres, l’augmentation de 10 fois dans les dépenses annuelles pour la défense de la Chine depuis 1989 peut sembler exceptionnelle.  Mais, mesurée d’une autre façon, comme une partie de l’économie globale, les dépenses militaires de la Chine semblent plus normales. Pour tous les discours des trophées d’armements et la rhétorique agressive de Beijing, les dépenses militaires sont petites par rapport aux normes internationales si elles sont mesurées en pourcentage du Produit Intérieur Brut. Lorsque l’on regarde les dépenses pour la défense de cette manière, les dépenses militaires de la Chine sont en fait moindres que celles de beaucoup de ses voisins en termes de pourcentage du Produit Intérieur Brut.

Quelque chose d’autre que les analystes de la défense soulignent est que, même si la Chine dépense de grosses sommes d’argent sur les dépenses pour la défense, une grande partie de cet argent va vers la sécurité intérieure, plutôt que la défense étrangère.  Une grande partie de la classe moyenne est de plus en plus insatisfaite de leur condition actuelle et les zones rurales sont jalouses de leurs cousins  plus riches des grandes villes.  Beijing augmente ses forces de défense aussi pour contrer un soulèvement interne dans les provinces.

Tout comme aux États-Unis, les dépenses pour la défense sont une partie du développement économique global de la Chine.  Comme le déclare le Dr Sam Perlo-Freeman, chercheur principal et chef du projet Sipri sur les dépenses militaires, « Il y a plus de tout dans la Chine actuelle, il y a plus de téléphones portables, il y a plus de pollution de l’air, il y a plus de bébés et il y a également plus de chars et un porte-avions de plus ».

Les exportations d’armes de la Chine peuvent aussi être comptabilisées de différentes manières.  Le Ministère des Affaires Étrangères de la Chine a contesté l’étude Sipri des exportations d’armes, en déclarant que l’étude avait mesuré le volume des armes plutôt que leur prix, ce qui n’est généralement pas rendu public.  Mesurer par le volume, a-t-il dit, sous-estime les exportations des États-Unis, qui sont plus chères.

Par ailleurs, d’autres analystes estiment que malgré le déploiement impressionnant d’équipements de haute technologie, l’armée de la Chine a encore peu de capacité opérationnelle pour les systèmes les plus avancés.

« L’armée semble fonctionner sur des slogans », explique un diplomate occidental à Beijing avec une connaissance approfondie de l’Armée Populaire de Libération de la Chine.  « Mais, opérationnellement, ils ont un long chemin à parcourir. »  Le manque d’avions de transport, par exemple, rend de plus en plus fréquent de voir des hordes de soldats de l’armée embarquer sur les vols commerciaux des compagnies aériennes chinoises vers la destination de leur devoir.

Bien qu’une grande partie des dépenses soit sur des projets prestigieux comme le Liaoning, un porte-avions soviétique que la Chine a mis en service en 2012 après l’avoir rééquipé, les experts disent que sans d’énormes améliorations dans la préparation au combat, dans la formation et dans la doctrine, pour ne pas mentionner les navires plus petits de soutien, ces prestigieuses plates-formes resteront accostées au port dans un conflit.

« Il y a des pilotes américains qui ont eu plus d’appontages que l’ensemble de l’armée chinoise », selon Gary Li, analyste indépendant de la défense de la Chine, en ajoutant que d’avoir un porte-avions ne signifie pas  savoir comment l’utiliser.  Ils sont à des années d’être en mesure de mener des opérations de porte-avions.

Les changements dans le commandement

Une chose qui a changé pour la Chine est qu’elle s’est éloignée de ses anciennes priorités stratégiques, comme une guerre terrestre contre l’Union Soviétique, vers la projection de son pouvoir vers la région occidentale du Pacifique.  Cela entraînera les États-Unis et son ANZUS (Traité de sécurité de l’Australie, de la Nouvelle-Zélande et des États-Unis) à repenser leur stratégie.

Analyser les budgets et le nombre de soldats raconte seulement la moitié de l’histoire de la stratégie militaire de la Chine.  Ce qui est plus important, c’est l’intrusion dans la sphère publique des questions militaires et de sécurité, ce qui n’était auparavant pas une priorité dans la période d’après Mao lorsque le développement économique était la clé.  La Chine semble s’ajuster d’un état en développement, pour devenir plus un état de sécurité nationale dont les priorités en matière de sécurité deviennent les considérations les plus importantes pour les dirigeants chinois.

Alors que les États-Unis et la Chine font face à des épisodes de crises budgétaires et économiques, qui, dans les deux pays s’écoulent dans le domaine politique, une crise économique se prépare en Chine, qui est beaucoup plus profonde que celle des États-Unis.

Une quelconque crise interne, que ce soit le marché boursier continuant à tomber, que ce soit l’Inde essayant de se déplacer vers l’est dans des territoires contestés, ou de la dissidence interne, ces réalités resteront les faits géopolitiques primordiaux pour ce pays.

Source :  KHOUSE.org

Traduit par PLEINSFEUX.ORG

Translate »